• Frictions avec le réel

    La Rédaction

     

    Ce pourrait être un thriller... A coup sûr, la réalité fait parfois deviner des fictions fantomatiques... Que se serait-il passé, si...

    Sans l’ambition des hommes, qui accélère les événements et leur ôte le bénéfice de la réflexion, la Ve République après de Gaulle n’aurait pas dû continuer au moins sans ajustements. On met toujours en avant que le calendrier a été bouleversé à partir de 1974, à la mort de Pompidou. Mais le second mandat du Général aurait dû s’achever en 1972. 

    La survenue de Mai 68, pour bénéfiquement secouer la torpeur d’une société aux mœurs vieillissantes et inadaptées ( nous en parlerons dans un prochain chapitre), a certes ébranlé la volonté de de Gaulle de poursuivre son œuvre, et ses biographes savent bien quelle a toujours été, au cours des phases de sa trajectoire, sa tentation de se retirer.

    Récemment, présenter la BD sur l’Affaire Markovíc a été l’occasion d’une rapide réflexion sur cette période, et d’abord, de tenter comprendre cette affaire où il n’y a rien à comprendre, et qui n’est pas résolue. Et pourquoi l’avons-nous présentée ? Parce que l’épisode récent entre Alain Delon, assisté de ses enfants, et son amie de compagnie, [ qui n’était pas sa compagne... mais laissons ce sujet] nous a fait nous pencher sur ce personnage fascinant.

    Que dire de cette étrange affaire, où un yougoslave, proche de Delon, auquel il est redevable, ayant rempli diverses fonctions subalternes auprès de lui (mais non la fonction de garde du corps comme les journalistes l’ont écrit), que l’on retrouve mort dans une décharge publique. Avant d’apprendre que son frère est (quelque chose comme) un responsable de la sécurité du Maréchal Tito...

    L’affaire prend une autre tournure quand elle se relie à des parties fines auxquelles aurait participé Madame Pompidou. Un montage soupçonné comme provenant de certains gaullistes, destiné à discréditer le Premier Ministre. Sans aucun succès, et c’est étonnant d’ailleurs... cette imputation restera sans aucun effet sur celui qui entre peu après à l’Élysée. D’autres suggèreront un scénario, crédible selon nous, que le tort de Markovíc aura été de séduire Nathalie Delon, séparée alors, d’Alain. Mais alors que devient la piste, opérée par l’Est, ou opérée par des gaullistes, ou pourquoi pas les deux ? Affaire jamais élucidée, et à notre avis, il s’agit d’une affaire à tiroirs. Qui marque vraisemblablement les gaullistes. Un ancien membre du SAC ne nous a-t-il pas déclaré un jour, comme de naturel : " j’ai vu l’autre jour Claude Pompidou me faire des avances et faire des avances à tout le monde sur les Champs-Élysées... " La musique, semble-t-il, était passée.

    Nous disons ici d’ordinaire que la scène politique est une scène théâtrale et factice. Nous continuons de le penser. Mais ce décor comporte des temps, des mesures, des gestes déclencheurs, et d’autres... qui le déclenchent... Pensons aux pseudo-émeutes, émeutes réelles si l’on veut mais provoquées, de la fin de juin et de début juillet, et tant d’événements qu’on ne prend pas garde de sortir de la roue de l’actualité pour les ausculter d’un regard clinicien.

    Comment un agrégé de lettres, occupant un haut rang chez Rothschild, croise-t-il un jour la route du Général, qui recherchait « quelqu’un sachant écrire... » Quelle blague, surtout quand on sait que les contemporains, auteurs spécialistes de la présidence gaullienne, ou les biographes de Pompidou, n’ont jamais su dire précisément comment s’est faite la rencontre. Chacun allant de sa version, parfois contradictoire, certains avouant que l’on n’en connaît rien. La piste Élisabeth de Miribel (1) est-elle sérieuse ? Tout est possible, comme tant de choses sont dépourvues de crédibilité dans l’aventure pompidolienne, dont la rondeur du personnage et sa jovialité, réelles, masquaient une ambition totale.

    Que se serait-il approximativement passé, sans Mai 68 et sans la phrase "malencontreusement" assassine de Pompidou dans un hôtel de Rome où il déclarait à un journaliste ( en gros ) « : S’il y a une élection présidentielle, je serai présent... »

    Pour de Gaulle, pour le seul qui impulsait de lui-même sa grande politique, et parfois sur le conseil de quelques hommes dont il appréciait l’avis, le prétexte pour quitter le pouvoir fut le referendum perdu sur la régionalisation.

    Quittant comme il l’aurait dû en 1972 le pouvoir, et non en 1969, le seul capable de lui succéder outre Chaban rattrapé par sa feuille d’impôts, demeurait Pompidou, alors en 1972, Giscard n’ayant pas encore un vent de poupe assez puissant. Que la maladie du premier survînt, ou ne survînt pas si tôt, ou encore qu’elle ne soit jamais apparue, l’enchaînement des événements que l’on connaît était rompu.

    En en 1973 et 1974, les deux chocs pétroliers enfonçaient le début du septennat Pompidou, non celui de Giscard qui pouvait préparer une riposte, une stratégie, à l’ombre de son ministère à Rivoli, en attendant 79. À cette date, Tonton, Mitterrand, toujours environné de son image IVe République, de ses deux échecs à l’élection présidentielle, peut-être même une troisième (non), et sa confrontation avec un Giscard usé de 81 n’aurait jamais existé. Au contraire il se serait heurté à un Giscard neuf volant sur le succès et dominant les situations. La suite, jusqu’ici, aurait été entièrement différente... 

    A quoi tiennent les réalités qui se doivent au hasard... et sinon, à beaucoup d’autres... Qui conduit qui, dans la logique de l’implacable, et des masques qui semblent lui donner vie ?

     

    1. Celle qui tapa à la machine, à Londres, l’Appel du 18 juin.


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